Féminiser ses équipe.Tip#3-Combattre le sexisme ordinaire

par | Sep 16, 2021 | All, Les femmes dans des postes de direction | 0 commentaires

Dans mon Tip #2 sur l’accueil des femmes dans vos équipes, j’ai très rapidement abordé le sujet qui fâche, l’éléphant au milieu des bureaux, celui qui est tellement ancré dans nos habitudes qu’il va falloir une vraie volonté de chacun et de chacune pour le combattre… Je nomme bien sûr : le sexisme ordinaire. Comme pour le reste, la seule tolérance acceptable est la tolérance zéro. Mais ici, la difficulté principale va être de savoir le reconnaître.

Ce ne sont pas les commentaires clairement déplacés qui font le plus de mal. Ceux-ci sont faciles à identifier et généralement unanimement condamnés par les membres de l’équipe. Ils sont finalement assez faciles à éliminer si vous décidez de vous attaquer au problème, en affichant clairement la position de la compagnie sur ce sujet. Le sexisme ordinaire est plus insidieux, il se cache dans les petites phrases, les petites remarques qui passent inaperçues, mais qui peuvent heurter celles à qui elles sont adressées. Il est d’autant plus difficile à combattre que la plupart des acteurs n’ont pas conscience de le pratiquer et au pire, pensent faire de l’humour.

Des remarques sans dessein malveillant…

Voyons ensemble quelques exemples.

– Le paternalisme bienveillant qui consiste à fournir plus d’explications à une femme qu’à un homme, ce qui peut, par là même, donner l’impression aux autres membres de l’équipe, mais aussi à elle-même qu’elle n’est pas à la hauteur de la tâche.

– Les commentaires sur l’indisponibilité supposée d’une femme qui aurait des enfants, dits sans dessein malveillant, sous-entendent l’idée qu’une femme ne peut pas assumer la même charge de travail qu’un homme et par conséquent ne peut pas avoir le même niveau de responsabilités. On peut classer dans cette catégorie par exemple, les questions telles que « comment ça se passe avec les enfants, pas trop dur de concilier travail et vie de famille ? »

– Les remarques déplacées sur l’émotivité des femmes qui décrédibilisent en quelques secondes une femme exprimant un désaccord. Cela donne un avantage presque systématique à l’adversaire dans une dispute (la pire étant à mon sens l’expression : “cette fameuse période du mois”). Un exemple classique est le désormais célèbre : « calmez-vous (…) Pour être président de la République, il faut être calme » que Nicolas Sarkozy adressa à Ségolène Royal lors du débat de l’entre-deux-tours de 2007, sous-entendant par là qu’elle avait une propension à la colère, et donc qu’elle n’était pas apte à devenir présidente (dont la réponse est tout aussi connue « il y a des colères qui sont parfaitement saines »).

– La coupure régulière de la parole des femmes en réunion qui permet de non seulement nier leurs compétences, mais également de s’approprier leurs idées. Un mot a même été crée pour définir ce phénomène, bien plus courant qu’il n’y paraît : le « manterrupting ». Une des premières études sur ce sujet remonte à 1975, menée par les sociologues Don Zimmerman et Candace West, qui ont examiné 31 conversations. Ils conclurent qu’il y avait 8 fois plus d’interruptions dans les discussions hommes-femmes que dans les discussions homme-homme, et dans 98 % des cas dans le sens homme-femme. De nombreuses statistiques qui analysent les échanges de paroles lors de débats télévisés (ou équivalents) sont régulièrement publiées, et elles montrent que le problème ne s’estompe pas avec le temps. Par exemple, la candidate Nathalie Kosciusko-Morizet fut interrompue 3 à 4 fois plus que ses adversaires masculins lors de la primaire de la présidentielle de 2016.

  – Et que penser de la manière dont sont perçues les conversations autour de la machine à café ? Là où les hommes résoudraient de grands problèmes stratégiques, les femmes « pipeletteraient », et partageraient des commérages.

– Nous pourrions continuer la liste (et je vous invite d’ailleurs à rajouter des exemples en commentaires), mais passons plutôt quelques minutes à voir ensemble comment chacun de nous peut agir à son niveau pour lutter contre ce sexisme ordinaire.

Réagir

Je le répète et je le répéterai autant que nécessaire, la seule tolérance acceptable est la tolérance zéro. On ne laisse rien passer, et l’on remet une personne à sa place si elle fait une des choses listées plus haut. Par exemple, on demande au collègue qui a interrompu une femme de la laisser parler, on réagit aux blagues déplacées, on explique pourquoi un comportement donné est inacceptable.        
Vous pourriez rétorquer que les femmes elles-mêmes pourraient le faire savoir lorsqu’un comportement est inconvenant. Seulement, cela peut être compliqué de répondre pour une jeune recrue avec peu d’expérience par exemple ou pour une employée qui serait face à son supérieur hiérarchique. Il est donc nécessaire d’intervenir lorsque l’on est dans une position qui nous le permet.

Et si vous vous posez la question de savoir de quelle façon différencier un comportement sexiste d’un comportement qui ne l’est pas, afin de ne pas y participer inconsciemment, voici une petite astuce simple : avant de faire une remarque à une femme, posez-vous la question : la diriez-vous à un homme ? Si la réponse est non, il est très probable qu’il faudrait mieux s’abstenir.

Il ne vous reste plus qu’à vous entraîner à reconnaître le sexisme ordinaire, puis vous appliquer à ne jamais le tolérer.

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